Légitime défense

Nous vous en parlions dans notre papier consacré à Fly me to the Moon (lire ici), les coproductions minoritaires sont une des spécialités du cinéma belge francophone. La liste est longue. Légitime défense en est un exemple récent. Et frappant.

Coproduit en Belgique par Saga Films, le film qui se déroule principalement dans le Nord de la France nous emmène notamment à Coxyde (rare!) et nous permet surtout de découvrir au générique de très nombreux techniciens belges et dans des rôles-clefs deux comédiens bien de chez nous: Olivier Gourmet et Marie Kremer (BXL/USA). Mais aussi Nicole Valberg, Sandrine Blancke ou encore Myriem Akheddiou.
Son premier long métrage en tant que réalisateur, l’acteur Pierre Lacan l’a écrit lui-même à partir d’un roman, Terminus Plage d’Alain Wagneur.  Loin d’être une simple et fidèle adaptation, le scénario opte pour des partis pris très personnels, comme celui de se focaliser sur un des deux personnages principaux du texte original. Du coup, ce polar très noir et violent s’inscrit plutôt dans la veine des récits passionnants popularisés par Harlan Coben.

Légitime défense est donc l’histoire d’un mec normal, qui n’a rien demandé à personne et qui va se retrouver embarqué dans une spirale criminelle à laquelle il ne comprend rien. Mais qui risque de le broyer. Lui, et les siens. Le pitch est classique et l’efficacité du polar construit autour défend de l’habileté du scénariste, de la virtuosité du metteur en scène et de son équipe, du réalisme des situations et de la crédibilité des acteurs.

Pour mener (subir) l’intrigue, il faut un gentil, fragile, mais capable de se rebeller: comme François Cluzet dans Ne le dis à Personne ou Blanc comme Neige, Vincent Lindon dans Pour elle, Gille Lellouche dans A bout portant. Un type qui peut capter la sympathie du spectateur qui s’identifiera à lui. Dans ce rôle, Jean-Paul Rouve est formidable. Forcément.

Pour que la sauce prenne, il faut aussi un vrai méchant qui, d’un seul regard (noir), terrorise la salle. Roshdi Zem était effrayant dans A Bout portant. Ici, dans un emploi qui peut évoquer celui qu’il tenait dans Sur Mes lèvres (même le look est identique), Olivier Gourmet est tout simplement terrifiant. Silencieux, imprévisible, il compose une crapule comme on en voit peu: sans le moindre scrupule, sans la moindre pitié. Il est d’ailleurs important de signaler aux âmes sensibles que le film ne lésine pas avec la violence et que certaines images peuvent choquer.

Benoît (Rouve) est un jeune père de famille qui mène une vie plutôt heureuse et sans histoire. Il est photographe, marié et vient d’avoir un fils. Un jour, l’agence de son père, détective privé, est cambriolée. Le paternel a disparu et Benoit est bien obligé de mettre le nez dans ses affaires d’autant qu’un truand (Gourmet, donc) compte sur lui pour récupérer une valise bourrée d’héroïne. De fil en aiguille, le fils qui le connaissait mal, découvrira que son géniteur, ex-flic un peu véreux n’est pas un homme sans reproche. (Très) Loin de là. Il fréquente le milieu et gère d’autres commerces répréhensibles et dangereux. Au fil de ses pérégrinations, Benoît rencontrera également Jessica (Marie Krémer), une jeune femme qui servait de comparse à son paternel.

Coincé entre les tueurs et des flics inquisiteurs qui ont quelques difficultés à le croire, Benoît va devoir galoper pour sauver sa peau et protéger sa famille. Mais il n’a pas la carrure d’un héros…

La mécanique est bien huilée et même si l’histoire est assez traditionnelle, la tension ne retombe pas. Quelques rebondissements inattendus, des digressions stressantes et un montage anarchique qui laisse pressentir l’inéluctable relancent encore l’intérêt et l’attention. Au bout du compte, on termine (comme les personnages) plutôt vidés et les nerfs en boule. C’était l’effet recherché. Mission accomplie, donc.

 

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