Unité 42, vues sur Bruxelles

Ce dimanche débute sur la RTBF Unité 42, nouvelle série « maison », qui suit les enquêtes criminelles d’une section de la police de Bruxelles dédiée à la lutte contre la cybercriminalité. Et ça démarre fort!

Ca fait un bout de temps qu’on l’attend, la nouvelle série 100% belge de la RTBF. Il y a deux hivers, les spectateurs belges découvraient avec surprise et enthousiasme que si, si, détrompez-vous, on pouvait faire des séries du côté francophone du Plat Pays. Pas des séries qui jouent des clichés populaires belges, non, des séries policières, noires, denses, hantées par les paysages souvent fantomatiques des Ardennes. La Trêve, puis Ennemi Public ont rencontré un véritable succès d’audience, doublé d’un succès réjouissant à l’international, mettant en avant nos talents, souvent d’ailleurs venus du cinéma, de Matthieu Donck, auteur et réalisateur de La Trêve, aux (très) nombreux acteurs belges souvent croisés sur des bouts de pellicule, et qui trouvaient là des rôles leur permettant d’accéder à un nouveau genre de popularité, comme Yoann Blanc et Jean-Jacques Rausin, mais aussi Anne Coesens, Catherine Salée, Jean-Henri Compère, Sam Louwyck, Angelo Bison, Clément Manuel, Philippe Jeusette, François Neycken, pour ne citer qu’eux!

Réalisme bruxellois

Unité 42 s’est donc fait attendre, mais revient finalement sur un tout autre terrain. Exit les Ardennes embrumées, place à Bruxelles, la belle certes, mais surtout celle des pavés déchaussés, des tours d’habitation qui touchent les nuages bas, des échafaudages à tous les coins de rue, et des caves insalubres. Car si Unité 42 reproduit un dispositif classique de série d’enquête criminelles à l’américaine (une équipe permanente et spécialisée – ici la cybercriminalité -, résout à chaque épisode une nouvelle enquête), la comparaison s’arrête là ou presque. On n’est pas dans les locaux flambants neufs des experts Miami ici, et l’épaisseur des personnages ne se limite pas à la hauteur du haussement de sourcil du héros. Si Unité 42 n’a pas grand chose à envier sur le plan du rythme ou du suspense à ses concurrentes d’outre-Atlantique, on est ici dans un cadre beaucoup plus réaliste. Réaliste parce qu’on (re)connaît l’écho des ruelles et des accents, mais réaliste aussi parce que les bureaux sont à la cave, le café est tiède, et les crimes sont brutaux.

Ultra-cybercriminalité

Unité 42 traite de cybercriminalité. Pas de détournement de compte Facebook, de hoax ou autres mails frauduleux, mais bien de hackings et autres live-cam qui mènent à des meurtres souvent très graphiques. Des meurtres voyeuristes, souvent retransmis en direct, des snuff movies des années 2000 en somme. Et de fait, la série n’hésite pas par moment à simuler ce voyeurisme.

Fidèle à son dispositif, non feuilletonnant, la série multiplie les intrigues, et propose des incursions dans des milieux on ne peut plus différents. Ainsi les deux premiers épisodes de dimanche: le premier multiplie les jeunes femmes célibataires poursuivies par un serial killer fétichiste, tandis que le second s’introduit dans le milieu de l’Islam radical avec l’assassinat d’un jeune imam. D’ailleurs, pour faire une bonne série, il faut de bons criminels, et les deux premiers épisodes se montrent assez ingénieux en la matière.

Duo inattendu

Unité 42 compose une variation sur un autre motif classique de série policière: le duo de flics que tout oppose. On a le Commissaire vieille école, Samuel Leroy, qui après une pause est affecté à une cellule underground, l’enquêteur de terrain qui mise sur l’empathie, face à Billie, la jeune louve débarquée de nulle part, ou plutôt si, tout droit venue de l’autre côté du miroir, le monde des hackers. L’un et l’autre se battent contre leurs fantômes, la femme décédée de l’un, l’amant disparu de l’autre. Pendant que Samuel tente tant bien que mal de maintenir les fils fragiles qui l’unissent à ses trois enfants, Billie  peine à faire le deuil de son amant disparu, dont elle n’admet pas la mort.

Dans le rôle de Samuel Leroy, on retrouve Patrick Ridremont. Le comédien, bizarrement rare sur les écrans belges alors qu’on le voit plus outre-Quiévrain, apporte densité et profondeur au personnage, dans un registre qu’on lui connait peu, du moins ici. Il est paumé chez lui depuis la mort de sa femme, dépassé par la crise d’adolescence de sa fille et l’émotivité de son fils. Il est paumé au boulot, face à cette bande de geeks qui lui parle sans cesse modems et Guide du voyageur intergalactique. Dans le rôle précieux de Billie, la jeune comédienne française Constance Gay surprend et impressionne. On notera que comme dans Ennemi Public, le rôle du flic rebelle et rétif à l’autorité est tenu par une femme, et ça fait du bien.

Dense et intense

Ajouter à tout cela une image percutante, et un montage dynamique et parfois surprenant, des seconds rôles au taquet (génial Roda Fawaz dans le rôle de Nassim, et l’incontournable Tom Audenaert, qui prête son irrésistible bonhommie au collègue flamand de service, Bruxelles oblige) et vous obtenez une série belge dense et intense, finalement surprenante malgré les réminiscences. C’est noir, très noir, et on est prêt à parier que dès la fin du premier épisode, vous courrez changer votre mot de passe.

1er et 2e épisode ce dimanche sur La Une à 20h50

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