Nous Quatre : drôle, émouvant, magique…

Les plus belles soirées sont forcément celles qui nous cueillent par surprise. Celle à laquelle nous avons assisté mardi soir, au Kinepolis Rocourt, pour la première belge (mondiale en fait) de Nous Quatre est incontestablement à ranger dans cette catégorie.

 

(Photo d’ouverture : Christophe Toffolo)

 

 

 

Rétroactes: en 2013, Stéphane Hénocque, réalisateur autodidacte, passionné de cinéma au point de passer sa vie devant des écrans, embarque une jeune brochette d’acteurs, quelques seconds rôles plus chevronnés et quelques amis techniciens pour un tournage façon commando.

 

Stéphane a écrit un scénario et se donne quinze jours pour le filmer. En tout et pour tout, l’équipe dispose de 4000 euros. Un projet fou, car l’histoire doit emmener l’équipe de Liège à Namur (jusque là, ça va), mais aussi au cœur des Ardennes, puis à Bruges et à la mer.
Malgré ce défi, Stéphane est ambitieux: pas question de brader ses envies de cinéma.

Au passage, il loue même un drone pour profiter à fond des paysages les plus champêtres et composer des images magnifiques qui nous renvoient tout droit aux Géants de Bouli Lanners.

 

(Photo  : Christophe Toffolo)

 

Nous quatre est globalement un road movie. On y suit les quatre jeunes gens du titre, dont le temps et quelques conflits larvés ont mis l’amitié à l’épreuve. S’ils se retrouvent aujourd’hui, un peu à l’insu de leur plein gré, c’est que le jeune David vient d’apprendre qu’il va devoir subir une greffe de la moelle épinière. Un frère, une sœur pourraient l’aider. Malheureusement, il est enfant unique et… adopté.

 

Sa seule chance (infime) est de retrouver son père biologique qui a laissé une lettre au moment de sa naissance. Avec ce maigre indice, il décide de partir à sa recherche. Pour faire le voyage, il se fait épauler par trois vieux amis, se disant que si sa démarche ne sert à rien, au moins il sera avec des gens qu’il aime. Comme il est pudique et qu’il veut profiter de la magie de l’instant, il ne leur parle pas de sa maladie.

Naturellement, la quête ne sera pas aussi simple que prévu et au fil de leurs pérégrinations, David, Chloé, Vince et Léo auront tout le temps de se dire des choses qu’ils ne se sont plus dites depuis longtemps.

 

 

Sur cette base, on pourrait évidemment attendre un film larmoyant. Il n’en est ABSOLUMENT rien.

Naturel, pétillant, souvent drôle, voire loufoque le temps d’une scène déjà culte, Nous Quatre est un bijou de cinéma populaire dans le sens le plus digne du terme. Tout n’y est pas parfait bien sûr: avec un budget aussi riquiqui, c’est totalement impossible. Mais absolument personne (pas même les quelques réalisateurs présents dans la salle) n’a pensé à relever ces petites faiblesses techniques à l’issue de la projection.
Tout le monde se disait au contraire totalement bluffé par la réussite globale.

 


Tous débutants ou presque les quatre jeunes acteurs tirent chacun leur épingle du jeu avec une complicité qui transparaît constamment même si, dans le film, leurs relations peuvent être parfois… compliquées.

Au sein de ce quatuor prometteur, on se permettra de mettre en exergue la « tête d’affiche » du projet, Pierre Olivier, sans doute celui qui a le moins de texte, mais dont la présence et le charisme transpirent à chaque plan. Avec son physique qui évoque Matthias Schoenaerts (certains parlent de Benoit Magimel, ce qui n’est pas faux), et l’intensité de son regard, il crève l’écran. On a hâte de le revoir.

Justine Louis, François Huberty et le très drôle Florian Paque devraient également poursuivre leur petit bonhomme de chemin dans le ciné.

 

 

Road movie oblige, Nous Quatre est aussi porté par des seconds rôles qui héritent tous de scènes fortes. Renaud Rutten incarne le personnage le plus développé. En père (adoptif donc), soucieux et concerné, très humain, il est juste parfait. Comme toujours, mais dans un registre très inhabituel pour lui.

Des comédiens comme Marcos Adamantiadis, désopilant en bodybuilder stéroïdé, Didier Boclinville, hilarant dans la scène des kayaks, ou Laurent d’Elia dans un rôle plus grave et capital marquent aussi les esprits.

 

 

(Photo  : Christophe Toffolo

 

Les formidables commentaires qui fleurissent sur la page FB du film depuis hier soir sont révélateurs du plaisir que les spectateurs ont pris à la découverte du film (voir ICI) et, naturellement, les remerciements les plus personnels et bouleversants ont été envoyés en MP. Nous en avons même lu un qui nous a quasi arraché des larmes.

 

Certains se moqueront forcément de toute cette émotion suscitée par un « petit » film tourné façon commando par un réal qui n’est pas du sérail, sans business plan, ni aide publique.

Mais qu’importe…

 

 

 (Photo  : Christophe Toffolo)

 

Comme les 1100 spectateurs présents dans les deux salles (certains étaient assis sur les escaliers), nous nous sommes juste régalé, sans aucune arrière-pensée, nous abandonnant totalement au naturalisme du jeu et à la cocasserie des scènes, emporté par le rythme de la mise en scène, la musique (magnifque) et par un scénario qui tient la route pendant quasi deux heures.

Découvrir un film comme celui-là, simple et attrayant, au cœur d’une salle remplie à craquer et sentir tout le monde vibrer à l’unisson reste une expérience fabuleuse qu’aucune télévision du monde (et aucune vision de presse, soyons francs) ne pourra jamais apporter.

 

 

Les acteurs et le réal ont dédicacé des affiches pendant près d’une demi-heure à la fin de la séance  (Photo  : Christophe Toffolo)

 

Quand ces conditions optimales servent un film qui a été imaginé et tourné dans le seul but de toucher le public, l’expérience devient magique.
C’est exactement pour cela que Nous Quatre nous a chavirés et qu’ils devraient aussi ravir un large public avide de cinéma populaire (quelque part entre Remi Bezançon et Bouli Lanners pour citer deux réals francophones) si, d’aventure, il a la chance de sortir sur d’autres écrans avec un minimum de publicité.

 

Dire que c’est tout le mal qu’on lui souhaite est un doux euphémisme.

 

 

Le fil de la soirée en images :

Toutes les photos : Christophe Toffolo

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Même accueil dans l’autre salle, ajoutée sous la pression de la demande populaire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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