Bitter Flowers, amer exil

Bitter Flowers, premier long métrage de fiction d’Olivier Meys, sort ce 28 mars en Belgique. Le film retrace le parcours chaotique, semé de désillusion, de courage et de solidarité d’une jeune femme chinoise qui s’exile à Paris pour chercher les moyens de faire mieux vivre sa famille, et qui va y trouver la misère, le mensonge et la prostitution.

Province du Dongbei, Chine. Lina vit avec son fils et son mari. Lui travaille, elle s’occupe du foyer. Il vivent tout juste correctement dans leurs cinquante mètres carrés, mais Lina rêve de mieux. La Chine est en pleine expansion économique, pourquoi celle-ci se ferait-elle sans eux? Seulement les perspectives de développement sur place sont minces, et Lina décide assez unilatéralement de s’expatrier seule en France, le temps de gagner de quoi ouvrir chez eux un petit restaurant. Il parait qu’à Paris, des familles chinoises recherchent des nounous originaires du Dongbei pour garder leurs enfants, et que la paye y est plutôt généreuse.

Lina vient à bout de la réticence de son époux, et réunit la somme nécessaire pour entreprendre ce voyage vers l’inconnu. Car arrivée à Paris, la solidarité tant espérée n’est pas exactement de mise. Elle enchaîne les déconvenues, accepte une place d’esclave moderne chez une famille qui l’exploite sans vergogne, et doit faire face à la déception de son mari qui lui rappelle qu’ils ont à peine de quoi rembourser les intérêts du prêt qu’ils ont contracté… Lina fuit cet enfer, pour se retrouver littéralement sur le trottoir. Acculée, elle n’a plus d’autre choix que de recourir à la prostitution pour rembourser ses dettes, et envisager de rentrer au pays sans renoncer à son rêve.

Bitter Flowers dépeint avec pudeur mais sans faux-semblant le quotidien de ces femmes soumises à des violences sexuelles, économiques et psychologiques, mais chez lesquelles la solidarité et la complicité prend souvent le dessus pour transcender la souffrance, et leur permettre de rêver à des jours meilleurs. C’est un film sur l’immigration, le mensonge, la nécessité de faire bonne figure face à ceux restés au pays, et l’engrenage infernal dans lequel certains et certaines finissent par perdre pied.

Lina peu à peu tente de refaire surface, et investit l’argent gagné d’une valeur symbolique forte, lui promettant un futur lumineux au bout du tunnel. Mais le piège se referme sur elle lorsqu’une jeune femme de sa province la contraint à l’aider à trouver un travail de nounou à Paris. Le regard extérieur et tragiquement lucide de cette jeune femme sur sa situation sonne le glas de son échappée pas si belle. Pour sauver les apparences, Lina consent à rentrer en Chine, où elle va devoir reconstruire son couple et restaurer l’intimité. Car Bitter Flowers est aussi un film d’amour et de trahison, de confiance et de sacrifice.

Bitter Flowers est un film intime et bouleversant sur la lutte d’une héroïne sacrificielle qui a l’audace de vouloir réussir, et en paiera le prix fort. Servi par la caméra à l’épaule de Benoît Dervaux, et par la performance remarquable de son héroïne, Xi Qi, le film offre tout à la fois une histoire d’amours contrariées, un tableau pudique mais saisissant du milieu de la prostitution chinoise à Paris, et un portrait émouvant de la complicité qui unit ces femmes dignes envers et contre tout, notamment à travers l’amitié entre Lina et Li Yumei. Un film fort et subtil sur le poids de l’immigration économique, et les contradictions de la Chine contemporaine.

Bitter Flowers, sélectionné en octobre dernier au Festival International du Film de Pusan, et en janvier au Ramdam de Tournai, sort ce 28 mars à Bruxelles et en Wallonie, et le 9 mai prochain en Flandre. Le film est produit par Tarantula, et distribué par Cinéart.

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