« C’est ça l’amour »: amours d’un père

Avec C’est ça l’amour, Claire Burger ose le pari d’esquisser les contours d’une masculinité libre et décomplexée en symbiose avec ses sentiments, territoire de fiction fertile porté avec coeur par la performance de Bouli Lanners.

« Repose-toi de moi. Prends ton temps. Quand tu reviendras, j’aurai changé. » Mario, petit fonctionnaire de province rattrapé par la cinquantaine voit sa femme partir, alors même que ses filles aspirent à prendre le large. Il n’a pas les clés pour faire face à ce départ, ni à ce besoin soudain d’émancipation. Il n’a pas de clé, mais il lui reste l’amour. L’amour qui survit à la séparation, et la rend possible. L’amour paternel, plus fort que tout (« Toute ma vie, c’est vous aimer »), l’amour filial, qui résiste aux tempêtes, l’amour sororal. Et puis l’amour propre, l’amour de soi qui ressurgit peu à peu, celui qui permet de se reconstruire, et de se découvrir non pas seulement sujet d’amour, mais aussi objet potentiel.

C’est toute une trajectoire d’amour que traverse Mario, l’amour sous toutes ses formes, les premiers émois de sa fille Frida, l’amour libre et fougueux de la plus grande, Niki, l’amour éteint qui ne demande qu’à renaître ailleurs de sa femme, et la possibilité d’une passion qui s’esquisse. A travers l’itinéraire de Mario, et des belles âmes qui l’entourent, s’élève un chant d’amour polyphonique, en dévoilant autant de facettes que de sujets amoureux.

Avec pudeur, justesse, bienveillance et empathie, Bouli Lanners et Claire Burger dressent avec le personnage de Mario le portrait d’une autre masculinité à mille lieux de celle imposée par les stéréotypes de notre société patriarcale. Une masculinité fragile, émotive, une masculinité qui doute et qui avance, et qui embrasse avec appétit raison ET sentiments.

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Mais C’est ça l’amour s’inscrit aussi dans le territoire réel de cette petite ville post-industrielle qu’est Forbarch, mettant ainsi en avant ces classes moyennes que l’on voit si peu au cinéma. Le film dit aussi le rôle de l’art comme outil d’appréhension de soi-même et des autres, à travers la pièce de théâtre participative dans laquelle s’engage Mario corps et âme, l’art comme moyen de réconciliation.

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Si c’est au rythme des battements du coeur de Mario que pulse le film, il serait injuste de passer sous silence la remarquable composition des deux jeunes comédiennes qui incarnent ses filles. Sarah Henochsberg compose une Niki fonceuse et déterminée, rebelle et aimante, jeune femme qui ne s’en laisse pas compter, à l’instinct protecteur surpuissant. Justine Lacroix quant à elle incarne Frida avec toute la spontanéité et la gravité de ses 14 ans, cet âge qui se vit exclusivement au présent, une Frida en pleine éclosion, dont la personnalité se dessine au fil du film. Cécile Remy-Boutang, enfin, incarne avec force conviction Armelle, la mère libérée, qui a l’insigne audace d’affirmer qu’elle est femme avant d’être mère.

Film d’amour mosaïque, juste et pudique, C’est ça l’amour, portrait sensible et émouvant d’un père qui se retrouve en perdant l’amour de sa vie, sort le 27 mars dans les salles belges.

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