« Notre territoire » de Mathieu Volpe, documentaire à la 1ère personne

Documentaire à la 1ère personne, Notre Territoire relate le retour au pays du réalisateur/narrateur, un Sud de l’Italie loin des cartes postales, fait de baraquements et de bidonvilles, qui accueille malgré lui la détresse des exilés partis chercher un avenir meilleur, envers et contre tous. 

Quand je suis arrivé à Rignano, les habitants du Ghetto m’ont dit : « Il ne faut pas garder des images de nos vies dans ces maisons précaires. Tu ne dois pas montrer ce désespoir, il ne t’appartient pas ». La misère du ghetto, c’est la première chose que j’ai vue, la première chose que j’aurai voulu montrer.

Les cartes postales sont bien là dans Notre territoire, des images en noir & blanc, le grain appuyé du Super 8, quelques notes de piano en fond sonore qui contribuent à ancrer dans un passé de carte postale ces vacanciers insouciants qui déambulent sur la plage. Cette plage, premier contact des jeunes migrants venus du Mali ou du Burkina Faso, qui y posent leur premier pied sur le sol européen. Deux mondes se croisent sans jamais se côtoyer. Les migrants sont invisibles, « ceux (que les Italiens) ne voudraient pas voir, qu’ils regardent avec méfiance, ou détournent les yeux ». 

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Le narrateur croise le chemin de Anns, un jeune homme installé en Italie, au Nord, comme déchiré entre les deux continents, qui vient dans le Sud chaque été comme pour retrouver un peu de son passé. Et puis dans les champs, c’est là que se trouve le travail. Ce qui au début n’était que des camps provisoires, liés au travail saisonnier, est devenu un véritable monde, un quartier délabré ignoré des gens de la ville, à quelques kilomètres de là. Des familles entières s’y retrouvent pendant l’été, la saison des récoltes. Cette migration intérieure donne le sentiment de recréer des communautés, comme un retour au village. Le réalisateur part à la rencontre de ces visages anonymes sur lesquels il remet des noms et des histoires.

L’écriture du film se distingue par son mélange de photos et d’images Super 8, rythmé par une voix off entre journal intime à la première personne et récit de vie à la deuxième personne. Un aller-retour entre l’oeil du témoin, et le vécu des protagonistes. Le travail sur le son, fort de bruitages rares mais puissants, met l’emphase sur la voix off, fluide mais très écrite, au sein de laquelle s’intercalent d’intrigantes phrases musicales jouées au piano.

Notre territoire, dévoilé au printemps dernier au Brussels Short Film Festival, sera présenté demain au Festival de Locarno dans la section « Pardi di Domani », soit les Léopards de demain.

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