Après « La trêve », rien ne sera plus vraiment comme avant

On ne va pas vous mentir : dimanche prochain sur le coup de 23h, vous allez vous sentir mal.

Lorsqu’aura défilé pour la dernière fois le générique de La Trêve, que le 10e épisode se sera achevé sur une envolée de la caméra vers le ciel (zut, on a spoilé 😉 ), vous allez ressentir un profond désarroi et un sentiment de vide difficile à combler.

 

Après cinq semaines de passion, de tensions, de suspense et de supputations, vous allez vous retrouver, vidés, dans votre canapé face à votre vie qui n’aura soudain plus le même goût.

Avec la perspective supplémentaire de devoir aller bosser le lendemain, ce qui ne devrait rien arranger à l’affaire.

Non, nous ne sommes pas devins : c’est ainsi que ça se passe pour tous les passionnés du monde quand s’achève une formidable série qui les a tenus en haleine, semaine après semaine et qui révèle enfin tous ses secrets.

 

 

On l’a constaté sur notre site, La trêve a suscité parmi vous un enthousiasme inédit. Passé les quelques récriminations initiales des bougons habituels (la série était supposée donner une mauvaise image de la Wallonie, on n’était pas censé croiser dans cette région un patelin aux consonances germaniques et un policier à l’accent flamand…), la passion n’a cessé de grandir et les épisodes 5 à 8 vous ont graduellement amené à un état de tension inédit en termes de production audiovisuelle belge francophone.

 

 

Pour certains d’entre vous, la tentation a été trop forte et le bouton rouge de votre télécommande vous a permis de découvrir dans la foulée des épisodes 7 et 8, la dernière ligne droite de la série. À tous ceux-là, bien sûr, nous demandons la plus totale discrétion (viewer discretion is advised comme disent les américains), car ils savent que la série se termine en apothéose sur un final éblouissant comme on n’en voit pas à l’écran tous les jours.

 

Soyons honnêtes : même les meilleures séries du genre qui nous ont captivés, citons Broadchurch, True Detective (saison 1), mais aussi The killing ou le mythique Bron/Broen, se sont parfois conclues sur des révélations attendues ou, somme toute, banales au regard de la tension distillée jusque-là.

 

 

On rassure ceux qui patientent encore : La Trêve réussit le tour de force de nous offrir un final à la fois totalement évident (tout a été suggéré dans la série), mais totalement bouleversant, sans un gramme de gras. Un ultime coup de poing au foie qui vous laissera pantois.

Vous le savez : nous avons eu la chance de voir l’intégralité de la série avant la diffusion ertébéeenne. Ce que vous ignorez par contre est l’état lamentable dans lequel nous nous sommes retrouvés ensuite : les bras ballants, en larmes (carrément), épuisés. Quel bonheur de se faire ainsi mener en bateau par des scénaristes, un réalisateur et des acteurs exceptionnels.

Que la série soit belge ne change rien à l’affaire sur le coup. Ce n’est qu’ensuite qu’on se rend compte du miracle hallucinant que cela suppose en termes d’ingéniosité et de talent pour un budget totalement riquiqui par rapport à l’impact obtenu.

 

 

La série pose alors question sur d’autres plans.

Son succès repose-t-il sur la passionnante dynamique impulsée par la Fédération Wallonie-Bruxelles qui a mis en place ce fonds inédit (une formidable idée) ou sur le seul génie d’une bande d’auteurs punks surdoués, soutenus par une prod audacieuse et inventive (Helicotronc) ?

On préférerait abattre sans sourciller la première carte, car cela signifierait que notre plaisir va se perpétuer aussi intense au fil de toutes les séries déjà mises en chantier qui vont nous arriver à dose homéopathique pendant les prochaines années. D’ailleurs HBO Showtime ou AMC, les chaînes câblées américaines qui nous ont donné Six feet under (la seule série qui rivalise avec La Trêve en termes de final éblouissant), Les Sopranos, The Wire, Dexter, Homeland Californication, Mad Men ou Breaking Bad ont prouvé que les perles pouvaient s’enfiler si le collier était solide.

Mais on parle justement ici de chaînes spécialisées qui s’adressent un public restreint, un poil élitiste. Et si La Trêve s’inscrit totalement dans la lignée de ces séries, on peut s’étonner et se réjouir après coup qu’elle ait eu la chance de se retrouver programmée le dimanche à 21h sur la Une et non à 22h30 sur la Trois. À cet égard, ce qu’on a vu jusqu’ici d’Ennemi Public, la série qui viendra juste après La Trêve, semble plus lisse et formaté que la série de Matthieu Donck, sans doute plus adapté à une case que certains voudraient plus consensuelle.

 

 

 

Or le succès retentissant de La trêve démontre évidemment qu’un certain public, biberonné à toutes ces bonnes séries que nous avons citées plus haut, est prêt à être traité en adultes cultivés et curieux et à suivre des séries audacieuses, brûlantes et glaciales, loin du formatage en vogue sur nos chaînes « hertziennes » francophones (chaînes françaises comprises).

 

Rien de sert de supputer à ce stade : l’avenir nous dira si La trêve fut un coup de maître magistral isolé ou l’annonce d’un âge d’or qu’on n’attendait pas aussi flamboyant.

 

 

De toute façon, tout bonheur est toujours bon à prendre. On se souviendra longtemps de cette série, de ce final éblouissant et on retrouvera dorénavant tous les acteurs de la série avec beaucoup de curiosité sur le petit et (surtout) le grand écran. Car on est certain que tout le monde a saisi le message, y compris à la commission de sélection des films :  le cinéma belge sort lui aussi chamboulé de cette aventure.

Quoi qu’il se passe désormais, rien ne sera plus vraiment comme avant…

 

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