Superstar : l’homme qui ne voulait pas être célèbre.

C’est l’histoire d’un gars à qui soudain tout le monde s’intéresse: on le montre du doigt dans le métro, on le poursuit dans la rue, on lui quémande des autographes. Et lui, ne sait absolument pas ce qu’on lui veut. Il n’a rien fait de spécial, il est le prototype du mec banal, au physique passe-partout, sans histoire, quelqu’un qui ne devrait passionner personne en dehors de quelques amis, collègues, frères, sœurs et cousins, cercle qu’on découvre très réduit. Et pourtant, sans aucune raison, Martin Kazinski est happé par un tourbillon médiatique qui fera de lui une star, une bête curieuse, puis un paria.

 

Adapté du roman « L’idole » de l’écrivain français Serge Joncour, sorti en 2004, Superstar (cadré par le Belge Christophe Beaucarne) est aussi et avant tout un film de Xavier Giannoli qui nous régala récemment avec son formidable « A l’origine ».

Il y a d’ailleurs un authentique parallélisme entre les deux oeuvres qui traitent, chacune à leur façon, du mensonge, du malentendu, de la dissimulation et de la célébrité, mais avec deux personnages on ne peut plus dissemblables.

 

 

 

Le magazine Marianne a parlé pour caractériser Superstar de « thriller existentiel ». Et c’est exactement de cela qu’il s’agit. Car même si le film est parfois drôle ou absurde, il est traité sur le ton du suspense, à la lisière du fantastique. Pourquoi les choses se déroulent-elles ainsi? Qui est à la base de cet engrenage? Le saura-t-on jamais?

Mais Superstar est avant tout une fable, passionnante et angoissante, comme les contes de notre enfance.

« J’ai voulu commencer le film à 1000 à l’heure et ne jamais lever le pied », explique le réalisateur dans une interview que nous publierons lundi. Mission accomplie.

 

Giannoli le prouve à nouveau ici : il n’a pas son pareil pour passer du cynisme le plus effroyable à des scènes où ruisselle une humanité nourricière (dépourvue de mièvrerie, c’est l’essentiel).

 

 

Dans ce rôle du quidam qui n’a rien demandé, Kad Merad est tout simplement exceptionnel. Le contre-emploi est amusant pour un des acteurs les plus connus de France, et pourtant on y croit sans réserve. On ne marche pas, on court. Dans celui de l’assistante de production écartelée entre l’envie de réaliser un gros coup professionnel et ses propres convictions, Cécile de France est non seulement crédible, elle est aussi souvent très émouvante. Par petites touches, grâce à une attitude inattendue, un tic perturbant, elle transmet son malaise au spectateur et sert de trait d’union entre le désarroi sincère de Martin et les médias qui n’ont qu’un objectif: faire de l’audience à tout prix, peu importe les conséquences. À sa manière, elle est le réceptacle de la fascination et du dégoût du spectateur

 

 

Sur le ton endiablé d’un suspense fantastique, Superstar est, vous l’aurez compris, la plus fulgurante des charges contre une société où l’hypermédiatisation imbécile du moindre rôt foule au pied toutes les valeurs essentielles. On sourit très souvent, on rit parfois aux éclats (deux fous rires de malade difficile à réprimer dans le chef de votre serviteur), on grince des dents, on serre les poings et on sort de la salle à la fois ému et totalement écœuré. Car oui, tout ce qu’on vient de voir est loin d’être une fiction. C’est le monde dans lequel on vit. On en est là.

 

Saint Martin, sauve-nous, ils sont devenus dingues !

 

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Grâce à Scope Pictures, Superstar est une coproduction belge.

La bande-annonce est à voir ICI

Pour en savoir plus sur ce formidable film qui sera en compétition au Festival de Venise , retrouvez lundi sur notre site une interview de Xavier Gianolli.

 

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