Sur le plateau des Survivants

Le rendez-vous est fixé à Esch-sur-Alzette, un endroit que seuls quelques Belges identifient : des fans de foot qui ont vaguement entendu parler de la Jeunesse Esch locale (les connaissances géographiques des fans de foot sont insoupçonnables) et des techniciens de cinéma de plus en plus souvent amenés à aller exercer leur art dans ce pays voisin du nôtre qui semble néanmoins si lointain.

 

Il faut dire que les coproductions luxembourgeoises sont de plus en plus courantes et qu’une des conditions imposées par Film Fund Luxembourg pour assurer son soutien est d’accueillir le tournage sur les terres (plus ou moins) boisées du Grand-Duché.

 

Toutes les photos Malik Jeddi/Kaos/Cinevox 2015

 

Préjudice, premier long métrage d’Antoine Cuypers avec Arno et Nathalie Baye a ainsi été entièrement tourné là-bas. Melody, Post Partum ou Dead Man Talking l’ont été en partie. Et la liste est très loin d’être exhaustive.

Au cœur de celle-ci, Les Survivants de Luc Jabon, film sauvé des abysses par le très cinéphile Nicolas Steil, patron d’Iris film qui, sur une suggestion de Philippe Reynaert, a rencontré le réalisateur et décidé de produire le film avec sa filiale belge. Quelle belle initiative !

 

 

Nous vous avons déjà parlé du film, du réalisateur, de son pitch et de son casting ICI.

La semaine dernière, nous avons rendu visite à l’équipe, filmé le contrechamp d’une scène assez complexe avec travelling et grosse figuration au programme, et effectué quelques interviews pour une prochaine capsule à voir en salles.

 

 

Nous avions aimé le scénario et comme toujours dans ce cas, nous étions curieux de prendre la température sur le plateau, histoire de voir comment le « jeune » réalisateur sexagénaire se débrouillait sur son premier long.

Une visite sur un tournage est un très bon indicateur de ce qu’on peut attendre d’un film. On a déjà été confronté à des cafouillages épiques qui prédisaient des naufrages. Avec, à la clef, des films hélas conformes à nos craintes.
On y a souvent vu l’inverse, heureusement.

 

 

« Luc, c’est un enfant. Il a douze ans et demi », s’amuse Erika Sainte, visiblement sous le charme. « Il est adorable, toujours bienveillant, il parle beaucoup et prend un vrai plaisir à chaque scène, même quand les conditions sont difficiles ».
« Difficiles » fait ici référence à la météo luxembourgeoise assez rude en ce début mars avec des températures qui, la nuit, plongent facilement sous zéro. On n’est pas au Québec, mais un -4 humide et aussi inattendu est parfois difficile à encaisser.

 

 

Les scènes de la cartonnerie resteront ainsi gravées dans la mémoire de l’équipe.

« Au début, on est tétanisé par le froid », résume Fabrizio Rongione, « mais plus on se concentre sur le travail, plus la sensation disparaît. C’est assez étonnant. Sinon, on boit beaucoup de thé et on prend un maximum de précautions pour ne pas être malade », poursuit celui qui a remporté de haute lutte le Magritte du meilleur acteur 2015 pour sa prestation dans Deux jours une nuit.

 

 

Il est un peu moins de 17h quand Fabrizio arrive sur le plateau pour un nouveau tournage de nuit. Il a le visage un peu fatigué du comédien qui a travaillé jusqu’à 4 heures du matin. Fatigué, mais toujours souriant, sympathique, disponible. Une vraie crème qui se fond parfaitement dans une ambiance de tournage feutrée et amicale.

Aujourd’hui, sa première scène n’est pas très compliquée: Fabrizio doit admirer le corps ondulant d’Erika Sainte et montrer qu’il est sous le charme. Et il est payé pour ça. Si, si 😉

 

 

Pendant que Luc Jabon discute avec ses deux acteurs principaux, leur explique ce qu’il attend d’eux dans cette scène où ils doivent se démarquer parmi les nombreux figurants qui incarnent le public d’un concert rock indé, Alain Marcoen, chef opérateur des frères Dardenne et complice de Luc sur le documentaire L’âge de raison, le cinéma des frères Dardenne étudie toutes les options qui se présentent à lui. L’homme est réservé, un peu timide peut-être, très concentré: il n’a pas la réputation de laisser quoi que ce soit au hasard

L’image qu’on découvre sur le combo est superbe, pleine d’ambiances, jonglant avec la profondeur de champ pour isoler ce qui est primordial.

 

 

Pour permettre à tous ces artistes de donner le meilleur d’eux-mêmes sans être perturbés par des contingences matérielles, Caroline Tambour assure à la perfection son rôle d’assistante à la mise en scène. Comme à son habitude.
Grâce à elle, tout ici est rodé au millimètre, ses propositions sont pertinentes et, surtout, l’ambiance bien que studieuse est totalement décontractée, propice au travail bien fait.

 

 

Vous l’aurez compris: cette excursion dans les entrailles du centre culturel d’Esch-sur-Alzette nous a largement confortés dans l’idée que Les Survivants qui devrait être prêt d’ici une douzaine de mois, a toutes les chances d’être une des bonnes surprises de l’année 2016.

Restez branchés, nous ne comptons pas lâcher l’affaire.

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